SAINT ETIENNE : 1ER MARTYRE
De l’Évangile de Matthieu 10, 17-22
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Méfiez-vous des hommes : ils vous livreront aux tribunaux et vous flagelleront dans leurs synagogues. Vous serez conduits devant des gouverneurs et des rois à cause de moi : il y aura là un témoignage pour eux et pour les païens. Quand on vous livrera, ne vous inquiétez pas de savoir ce que vous direz ni comment vous le direz : ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là. Car ce n’est pas vous qui parlerez, c’est l’Esprit de votre Père qui parlera en vous. Le frère livrera son frère à la mort, et le père, son enfant ; les enfants se dresseront contre leurs parents et les feront mettre à mort. Vous serez détestés de tous à cause de mon nom ; mais celui qui aura persévéré jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. »
Quand on vous livrera, ne vous inquiétez pas de savoir ce que vous direz ni comment vous le direz : ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là. Mt 10,19
Le Sang de Jésus prend la défense des créatures devant la justice divine.
Le livre du Ciel Tome 17, 1er juillet 1924
« Ma fille, prions ensemble. Nous traversons une bien triste période ! Ma justice, incapable de se contenir à cause de la malice des créatures, voudrait submerger la terre de nouveaux châtiments. La prière dans ma Volonté est donc nécessaire : couvrant toutes les créatures, elle doit se porter à leur défense et empêcher ma justice de s’approcher d’elles pour les châtier. » Comme il était touchant de voir Jésus prier ! Et vu que je l’accompagnais dans le douloureux mystère de sa flagellation, il se montra en train de verser son Sang. Je l’ai entendu dire : « Mon Père, je t’offre mon Sang. Oh ! laisse-le couvrir les intelligences des créatures, éloigner d’elles les pensées mauvaises et apaiser le feu de leurs passions afin que leur intelligence devienne sainte. Que ce Sang couvre leurs yeux de telle sorte qu’elles ne se laissent pas séduire par les plaisirs mauvais et ne soient pas salies par la boue terrestre. Que ce Sang remplisse leur bouche et rende leurs lèvres incapables de proférer des blasphèmes, des injures et toute autre parole mauvaise. Mon Père, que ce Sang couvre leurs mains, afin que les actions mauvaises leur deviennent insupportables ! Que ce Sang circule dans notre Volonté éternelle pour ensuite couvrir toutes les créatures et les protéger devant les droits de notre justice. » Qui pourrait décrire la manière de prier de Jésus et rappeler tout ce qu’il a dit ! Ensuite, il garda le silence et prit ma pauvre âme dans ses mains en la palpant et l’examinant. Je lui dis : « Mon Amour, que fais-tu là ? Y a-t-il quelque chose en moi qui te déplaise ? » Il me répondit : « Je pétris ton âme et lui donne de l’expansion dans ma Volonté. De toute façon, je n’ai pas à te rendre compte de ce que je fais en toi, car par le fait que tu t’es donnée complètement à moi, tu as perdu tes droits ; tous tes droits m’appartiennent. Sais-tu quel est ton seul droit ? C’est que ma Volonté soit tienne et que je te fournisse tout ce qui puisse te rendre heureuse dans le temps et l’éternité. »
Correspondances dans « L’évangile tel qu’il m’a été révélé » de Maria Valtorta :
La disposition de la salle du Sanhédrin est la même qu’au procès de Jésus, dans la nuit du jeudi au vendredi, et les personnes aussi. Le grand-prêtre et les autres sont assis sur leurs sièges. Au centre, devant le grand-prêtre, dans l’espace vide où se tenait Jésus durant le procès, se tient maintenant Etienne. Il doit déjà avoir confessé sa foi et apporté son témoignage sur la vraie nature du Christ et sur l’Eglise, car le tumulte est à son comble ; dans sa violence, il est en tout semblable à celui qui s’agitait contre le Christ dans la nuit fatale de la trahison et du déicide.
Coups de poing, malédictions, blasphèmes horribles sont lancés contre le diacre Etienne qui, sous les coups brutaux, vacille et chancelle tandis que, férocement, ils le tirent d’un côté ou de l’autre. Mais lui garde son calme et sa dignité, et même davantage : il est non seulement calme et digne, mais même bienheureux, presque en extase.
Sans s’occuper des crachats qu’il reçoit en pleine face, ni du sang qui coule de son nez brutalement frappé, il lève à un certain moment son visage inspiré et son regard lumineux et souriant pour regarder fixement une vision connue de lui seul. Il ouvre ses bras en croix et les lève comme pour étreindre ce qu’il voit. Puis il tombe à genoux en s’écriant :
« Je vois les Cieux ouverts et le Fils de l’Homme, Jésus, le Christ de Dieu, que vous avez tué, qui siège à la droite de Dieu. »
Alors le tumulte perd le minimum d’humanité et de légalité qu’il gardait encore, et avec la furie d’une meute de loups, de chacals, de fauves enragés, tous s’élancent sur le diacre, le mordent, le piétinent, le saisissent, le relèvent en le tirant par les cheveux, le traînent, le laissent retomber… La furie s’oppose à la furie, car dans la rixe ceux qui cherchent à entraîner le martyr dehors sont contrariés par ceux qui le tirent dans une autre direction pour le frapper et le piétiner de nouveau.
645.2 Parmi les plus furieux, se trouve un jeune homme laid et de petite taille, qu’on appelle Saul. Il est impossible de décrire la férocité de son visage.
Dans un coin de la salle se tient Gamaliel. A aucun moment il n’a pris part à la bagarre, ni adressé la parole à Etienne, ni à aucun puissant. Son dégoût devant cette scène injuste et cruelle est bien visible. Dans un autre coin, l’air écœuré et étranger au procès et à la mêlée, se trouve Nicodème, qui regarde Gamaliel dont le visage a une expression plus claire que toute parole. Soudain, quand il voit que, pour la troisième fois, on soulève Etienne par les cheveux, Gamaliel s’enveloppe dans son ample manteau et se dirige vers une sortie opposée à celle vers laquelle on traîne le diacre.
Son geste n’échappe pas à Saul qui s’écrie :
« Rabbi, tu t’en vas ? »
Gamaliel ne répond rien. Saul, qui craint que Gamaliel n’ait pas compris que la question s’adressait à lui, répète et précise :
« Rabbi Gamaliel, tu te détournes de ce jugement ? »
Gamaliel fait volte-face et, avec un regard terrible tant il est dégoûté, l’air hautain et glacial, il répond seulement : “ Oui. ” Mais c’est un “ oui ” qui a plus de portée qu’un long discours.
Saul comprend tout ce qu’il y a dans ce “ oui ” et, abandonnant la meute féroce, il court vers Gamaliel, le rejoint, l’arrête et lui dit :
« Tu ne veux pas dire, rabbi, que tu désapprouves notre condamnation ! »
Gamaliel ne le regarde pas et ne lui répond pas.
Saul poursuit :
« Cet homme est doublement coupable : pour avoir renié la Loi en suivant un Samaritain possédé par Belzébuth, et pour l’avoir fait après avoir été ton disciple. »
Gamaliel continue à ne pas le regarder et à se taire.
Alors Saul demande :
« Serais-tu donc, toi aussi, un partisan de ce malfaiteur appelé Jésus ? »
Cette fois, Gamaliel lui répond :
« Je ne le suis pas encore. Mais s’il était ce qu’il disait — et en vérité beaucoup de choses tendent à le prouver —, je prie Dieu de le devenir.
– Horreur ! s’écrie Saul.
– Il n’y a là aucune horreur. Chacun a une intelligence pour s’en servir et une liberté pour l’appliquer. Que chacun l’utilise donc d’après la liberté que Dieu a donnée à tout homme et la lumière qu’il a mise dans le cœur de chacun. Les justes, tôt ou tard, emploieront ces deux dons de Dieu pour le bien, et les mauvais pour le mal. »
A ces mots, il part vers la cour où se trouve le Trésor et va s’appuyer à la même colonne contre laquelle Jésus avait parlé de la pauvre veuve qui donne au Trésor du Temple tout ce qu’elle a : deux piécettes.
645.3 Après quelque temps, Saul le rejoint et se plante devant lui.
Il y a entre les deux hommes un très grand contraste. Gamaliel est grand, il a une certaine noblesse, il a un beau visage aux traits fortement sémitiques, un front haut, des yeux très noirs, intelligents, pénétrants, longs et très enfoncés sous d’épais sourcils droits, un nez droit lui aussi, long et fin qui rappelle un peu celui de Jésus. La couleur de sa peau, sa bouche aux lèvres fines rappellent également celles du Christ. Mais les moustaches et la barbe de Gamaliel, autrefois très noires, sont maintenant grisonnantes et plus longues.
Saul, au contraire, est petit, trapu, presque rachitique, avec des jambes courtes et grosses, un peu écartées aux genoux — on les voit bien, car il a enlevé son manteau et porte seulement une légère tunique grise. Il a des petits bras musclés comme les jambes, le cou raide et trapu qui soutient une grosse tête brune, avec des cheveux ras et rêches, des oreilles plutôt écartées, un nez camus, de grosses lèvres, des pommettes hautes et épaisses, un front bombé, des yeux sombres un peu bovins, sans douceur, mais très intelligents sous des sourcils arqués, drus et hérissés. Ses joues sont couvertes d’une courte barbe aussi hirsute que les cheveux et très fournie. Peut-être à cause de son cou si court, il paraît légèrement bossu ou avec des épaules très voûtées.
645.4 Il se tait un moment en fixant Gamaliel, puis il dit quelque chose à voix basse. Gamaliel lui répond d’une voix bien nette et forte :
« Je n’approuve pas la violence. Pour aucun motif. Tu n’auras jamais de moi la moindre approbation d’un dessein violent. Je l’ai même dit publiquement, à tout le Sanhédrin, quand on a pris pour la seconde fois Pierre et les autres apôtres et qu’ils ont été amenés devant le Sanhédrin pour y être jugés. Et je le répète : “ Si c’est une œuvre humaine, elle périra d’elle-même ; si elle vient de Dieu, les hommes ne pourront la détruire, en revanche, ils pourront être frappés par Dieu. ” Ne l’oublie pas.
– Es-tu le protecteur de ces blasphémateurs, disciples du Nazaréen, toi qui es le plus grand rabbi d’Israël ?
– Je suis le protecteur de la justice. Or elle enseigne que, dans les jugements, il faut faire preuve de prudence et de justice. Je te le répète : si c’est une œuvre qui vient de Dieu, elle résistera, sinon elle tombera d’elle-même. Mais moi, je ne veux pas me tacher les mains avec un sang dont je ne sais pas s’il mérite la mort.
– C’est toi, un pharisien et un docteur, qui parles ainsi ? Tu ne crains pas le Très-Haut ?
– Plus que toi. Mais je réfléchis. 645.5 Et je me souviens… Tu n’étais qu’un enfant, pas encore un fils de la Loi, alors que j’enseignais déjà dans ce Temple avec le rabbi le plus sage de ce temps… et avec d’autres qui étaient sages, mais pas justes. Notre sagesse reçut, entre ces murs, une leçon qui nous donna à réfléchir pour le reste de notre vie. Les yeux du plus sage et du plus juste de notre temps se fermèrent sur le souvenir de cette heure, et son esprit sur l’étude de ces vérités, entendues des lèvres d’un enfant qui se révélait aux hommes, spécialement aux justes. Mes yeux ont continué à veiller, et mon esprit à réfléchir, en coordonnant les événements et les choses… J’ai eu le privilège d’entendre le Très-Haut parler par la bouche d’un enfant, qui devint un homme juste, sage, puissant, saint, et qui fut mis à mort précisément à cause de ces qualités. Les paroles qu’il a dites alors ont pu être confirmées par des faits arrivés plusieurs années après, à l’époque annoncée par Daniel…
Malheureux que je suis de n’avoir pas compris plus tôt… d’avoir attendu le dernier et terrible signe pour croire, pour comprendre ! Malheureux peuple d’Israël qui n’a pas compris alors et ne comprend toujours pas aujourd’hui ! La prophétie de Daniel et celle d’autres prophètes et de la Parole de Dieu continuent, et elles s’accompliront pour Israël entêté, aveugle, sourd, injuste, qui continue à persécuter le Messie dans ses serviteurs !
– Malédiction ! Tu blasphèmes ! Vraiment, il n’y aura plus de salut pour le peuple de Dieu si les rabbis blasphèment, reniant Jéovêh, le Dieu vrai, pour exalter et croire un faux Messie !
– Ce n’est pas moi qui blasphème, mais tous ceux qui ont insulté le Nazaréen, et continuent à le mépriser, en méprisant ses fidèles. Toi, oui, tu le blasphèmes parce que tu le hais, en lui et dans les siens. Mais tu as raison quand tu dis qu’il n’y a plus de salut pour Israël. Cependant, ce n’est pas parce que des juifs passent dans son troupeau, mais parce qu’Israël l’a frappé à mort, lui.
– Tu me fais horreur ! Tu trahis la Loi, le Temple !
– Alors dénonce-moi au Sanhédrin, pour que j’aie le même sort que celui que l’on se prépare à lapider. Ce sera le commencement et la fin heureuse de ta mission. Et moi, grâce à mon sacrifice, je serai pardonné de n’avoir pas reconnu et compris le Dieu qui passait, Sauveur et Maître, parmi nous, ses fils et son peuple. »
645.6 Avec un geste de colère grossier, Saul s’éloigne, pour retourner dans la cour qui donne sur la salle du Sanhédrin et où la clameur de la foule, exaspérée contre Etienne, est plus forte que jamais. Saul rejoint les bourreaux dans cette cour, s’unit à eux, qui l’attendaient, et sort, avec les autres, du Temple puis des murs de la ville. Insultes, moqueries, coups, continuent à l’adresse du diacre qui avance, déjà épuisé, blessé, chancelant vers le lieu du supplice.
Hors des murs, il y a un espace inculte et pierreux, absolument désert. Arrivés là, les bourreaux forment un cercle autour du condamné, seul au milieu. Ils lui arrachent ses vêtements, déchirés et couverts de sang à plusieurs parties du corps à cause des blessures reçues. Etienne ne garde qu’une tunique très courte. Tous s’écartent alors et enlèvent leurs vêtements longs pour rester en tunique courte comme celle de Saul, à qui ils confient leurs vêtements. Celui-ci ne prend pas part à la lapidation, soit qu’il ait été impressionné par les paroles de Gamaliel, soit qu’il se sache incapable de viser juste.
645.7 Les bourreaux ramassent de grosses pierres et des silex coupants, qui abondent à cet endroit, et commencent la lapidation.
Etienne reçoit les premiers coups en restant debout, et avec un sourire de pardon sur ses lèvres blessées. Un instant avant le début de la lapidation, il a crié à Saul, occupé à rassembler les vêtements des bourreaux :
« Mon ami, je t’attends sur le chemin du Christ. »
Saul lui avait répondu : “ Porc ! Obsédé ! ” en unissant aux injures un vigoureux coup de pied dans les jambes du diacre, qui manque de tomber sous la violence de l’agression et à cause de la douleur.
Après plusieurs jets de pierre qui l’atteignent de tous côtés, Etienne tombe à genoux, appuyé sur ses mains blessées et, se rappelant certainement un lointain épisode, il murmure en touchant ses tempes et son front blessés :
« C’est bien ce qu’il m’avait prédit ! La couronne… les rubis… ô mon Seigneur, mon Maître, Jésus, reçois mon esprit ! »
Une autre grêle de coups sur sa tête déjà blessée le couche complètement sur le sol, qui s’imprègne de son sang. Pendant qu’il s’abandonne au milieu des pierres, toujours sous une grêle d’autres projectiles, il expire en murmurant :
« Seigneur… Père, pardonne-leur… ne leur impute pas ce péché… Ils ne savent pas ce qu’ils…»
La mort coupe la phrase sur ses lèvres. Un dernier sursaut le pelotonne sur lui-même et il reste ainsi. Mort.
Les bourreaux s’avancent, lancent sur lui une autre grêle de pierres sous lesquelles ils l’ensevelissent presque. Puis ils reprennent leurs habits et retournent au Temple, pour raconter, ivres d’un zèle satanique, ce qu’ils ont fait. ch 645-646