L’Amour dans l’état continuel d’agonie et de mort.
Ma fille, mon état présent devient de plus en plus douloureux. Si tu m’aimes, assure-toi que tes yeux soient toujours fixés sur moi, afin de bien retenir tout ce que je t’ai appris. Ainsi, tu pourras porter quelque soulagement à ton petit Jésus qui souffre tant, ne serait-ce que par un mot d’amour, une caresse ou un baiser affectueux, pour donner à mon cœur la douce satisfaction de recevoir ton amour en échange. Tu m’empêcheras ainsi de pleurer amèrement et tu me soulageras des afflictions implacables que je souffre ici.
Écoute, ma fille, après avoir donné à l’humanité autant de preuves de mon amour dans les huit excès précédents, elle aurait dû céder devant mon amour véritable et sublime. Or, elle a réagi avec tant de méchanceté qu’elle a provoqué un autre excès d’amour, excès qui sera le plus douloureux pour moi si l’humanité ne veut pas y correspondre. Jusqu’ici l’humanité ne s’est jamais abandonnée. C’est pourquoi j’ai dû ajouter, au huitième excès de mon amour, un neuvième qui consiste à un amour vif et enflammé pour elle, ainsi qu’un désire ardent d’être libéré du Sein maternel pour pouvoir partir à sa recherche. Après l’avoir retenu au bord de l’abîme, je désire étreindre et embrasser cette humanité toujours pleine d’ingratitude envers mon amour, afin qu’elle en vienne à aimer ma beauté, mes vérités et mes biens éternels que je veux à tout prix qu’elle possède pour toujours.
Ce dessein inestimable réduit ma petite humanité qui n’est pas encore née, à une telle agonie qu’il me semble rendre mon dernier soupir. Si je n’avais pas été aidé et soutenu par ma Divinité, laquelle est inséparable de moi par l’union hypostatique, j’aurais déjà rendu ce dernier souffle. La Divinité me communiquait continuellement de suaves gouttes de vie nouvelle, pour me faire résister à l’agonie permanente de ces neufs mois dont on pourrait dire qu’ils furent plutôt des mois de trépas que des mois de vie.
Tel est, ma fille, le neuvième excès de mon amour : une agonie constante dès le premier instant ou ma Divinité est entré dans le Sein maternel pour prendre forme humaine et cacher l’essence de sa propre Divinité. Sinon, j’aurais inculqué à la créature que je veux unir à mon amour, plutôt la peur que l’amour. Pauvre de moi ! Quelle longue agonie furent ces neuf longs mois durant lesquels j’attendais la créature ! Oh ! Combien l’amour m’étouffe et comme la créature me fait subir des morts continuelles ! Ma fille, je te le répète, si mon humanité n’avait pas reçu de soutien et de force de la part de la Divinité afin de supporter l’immense amour qui me consumait entièrement, elle aurait été malheureusement réduite en cendre et complètement anéantie par l’effet de mon amour. Outre mon amour qui souffre, mendie et supplie, il m’a fallu assumer moi-même l’énorme fardeau de souffrances qui revenait à chaque créature, et ceci à sa place, à titre de réparations exigées par la Justice Divine. Et qu’est-ce-que mon amour mendie constamment ? Le cœur froid et indifférent de l’homme !
Voici pourquoi ma vie dans le Sein maternel est devenu si douloureuse et je sens que je ne peux plus être séparé de la créature. Je veux à tout prix la presser sur mon cœur pour lui faire sentir les battements de mon cœur enflammé, l’embrasser dans mon affection la plus intime et la plus tendre, et lui donner mes biens éternels. Tu sais qu’en ce moment, si tu n’étais pas là pour me réconforter avant ma naissance, je serais entièrement consumé par ce nouvel excès de mon amour.
Fixe tes yeux sur moi dans le Sein maternel, et vois comme je suis devenu pâle. Porte attention à ma voix affaiblie ; on dirait celle d’un mourant. Perçois les battements de mon cœur ; à certains moments, il palpitait vigoureusement, mais à présent il s’est presque arrêté de battre. Ne laisse pas tes yeux se détourner de moi, parce que regarde bien, je sens qu’à l’instant même, je vais mourir. Oui, je meurs, et je meurs de pur amour.
Pendant que tout ceci se passait, je me sentais mourir par amour pour Jésus ; il se fit alors un grand silence de la part de nous deux, un silence de mort. Mon sang se figea et cessa de circuler dans mes veines, et je ne pouvais plus sentir battre mon cœur. Je cessai de respirer et tremblant de la tête aux pieds, je tombai par terre. Dans ce sommeil mortel, seule ma langue balbutia : “Mon Jésus, mon amour, ma vie, mon tout, ne meurt pas, car je t’aimerai toujours ! Jamais plus je ne te quitterai, même au prix de n’importe quel sacrifice. Donne-moi toujours les flammes de ton amour pour t’aimer de plus en plus, afin de me consumer le plus tôt possible, de sorte que je sois amoureusement tout à Toi, mon noble, mon éternel, mon bon Jésus”. Je peux dire qu’a ce moment je me suis sentie plus morte que vive pour l’amour de mon Jésus, Lui qui était déjà né à notre vie mortelle afin de nous assujettir en premier lieu à la mort de notre volonté pour ensuite, nous conduire à la vrai vie éternelle. Son toucher, alors, me sortit du sommeil dans lequel j’étais assoupie, et Jésus prononça ces paroles merveilleuses : “Fille rachetée par mon amour, viens, élève-toi à la vie de ma grâce et de mon amour. Conforme-toi en tout à ton Jésus. Comme tu m’as tenu compagnie par les neuf considérations des excès de mon amour durant la neuvaine de ma naissance, continue maintenant avec les vingt-quatre considérations concernant ma passion et ma mort sur la croix, tout en les répartissant sur les vingt-quatre heures de la journée. En elles, tu découvriras encore de nouveaux et sublimes excès d’amour et tu m’apporteras un continuel réconfort dans les plus douloureuses souffrances que la créature ingrate m’ait infligées. dans la vie, tu seras amoureusement et toute vouée à ma passion et à ma mort, et à ta mort, tu auras la plus belle part de ma gloire.