« Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret. » Saint Matthieu (1,16.18-21.24a.)
« Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement. […] Personne, pas même saint Joseph ne savait, au début de ma Conception, que j’étais déjà parmi eux. »
Le Livre du Ciel Tome 27, 21 octobre 1929
« Ma fille, ma Divine Volonté règne. On peut la comparer à moi, Verbe éternel, qui en descendant du Ciel me suis enfermé dans le sein de ma céleste Mère. Qui en savait quelque chose ? Personne, pas même saint Joseph ne savait, au début de ma Conception, que j’étais déjà parmi eux. Seule mon inséparable Mère était au courant de tout. Ainsi le grand prodige de ma descente du Ciel sur la terre avait eu lieu, en réalité ; et tandis que dans mon immensité, j’existais partout – le Ciel et la terre immergés en moi, j’étais enclos avec ma Personne dans le sein maternel de la Reine immaculée – personne ne me connaissait, j’étais ignoré de tous. Ainsi, ma fille, c’est ici le premier pas du parallèle entre moi, Verbe divin, quand je descendis du Ciel, et ma Divine Volonté qui fait ses premiers pas pour venir régner sur la terre. Tout comme je dirigeai mes premiers pas vers la Vierge Mère, ma Volonté dirige ses premiers pas en toi ; et comme elle t’a demandé ta volonté et que tu la lui as abandonnée, elle a immédiatement formé son premier acte de conception dans ton âme ; et à mesure qu’elle manifestait ses connaissances, t’administrant ses nombreuses et divines gorgées, elle formait sa vie et donnait le départ à la formation de son Royaume. Mais durant très longtemps, qui en a su quoi que ce soit ? Personne ; il n’y avait que toi et moi ; et après quelque temps, mon représentant, celui qui te dirigeait, a pris conscience de ce qui se passait en toi – symbole de mon représentant, saint Joseph, qui devait apparaître comme mon père devant les créatures, et qui, avant que je ne sorte du sein maternel, eut le grand honneur et le grand don de savoir que j’étais déjà parmi vous. »
Correspondances dans « L’évangile tel qu’il m’a été révélé » de Maria Valtorta :
Je vois donc le petit jardin de Nazareth. Marie file à l’ombre d’un pommier très touffu et croulant de fruits qui commencent à rougir et ressemblent à autant de joues d’enfant roses et rondes.
Mais Marie n’a pas ces belles couleurs. Sa bonne mine, ses joues rouges d’Hébron ont disparu. Son visage est pâle comme de l’ivoire, et seules ses lèvres y dessinent une courbe de léger corail. Sous ses paupières abaissées, deux ombres obscures, et le bord des yeux est gonflé comme lorsqu’on a pleuré. Je ne vois pas ses yeux parce qu’elle penche légèrement la tête, attentive à son travail et plus encore prise par des pensées attristantes, car je l’entends soupirer comme quelqu’un dont le cœur est blessé.
Elle est tout habillée de blanc, de lin blanc : il fait en effet très chaud, même si la fraîcheur encore intacte des fleurs m’indique que c’est le matin. Elle a la tête nue et le soleil, qui joue avec le feuillage du pommier qu’une brise légère soulève, et qui filtre en faisant des traînées de lumière sur la terre brune des parterres, dessine des ronds de lumière sur sa tête blonde et sur ses cheveux qui prennent des reflets d’or pur.
Il ne vient aucun bruit ni de la maison ni des alentours. On n’entend rien d’autre que le murmure du filet d’eau qui descend dans la vasque au fond du jardin.
Un coup frappé énergiquement à la porte de la maison fait sursauter Marie. Elle pose de côté sa quenouille et son fuseau et se lève pour aller ouvrir. Son vêtement a beau être souple et ample, il ne parvient pas à dissimuler la rondeur de son bassin.
Elle se trouve face à Joseph. Marie pâlit jusqu’aux lèvres. Son visage ressemble maintenant à une hostie tant il est exsangue. Le regard de Marie est triste et interrogatif. Le regard de Joseph paraît suppliant. Ils se regardent en silence. Enfin, Marie parle :
« A cette heure-ci, Joseph ? Tu as besoin de quoi que ce soit ? Que veux-tu me dire ? Viens. »
Joseph entre et referme la porte. Il ne dit toujours rien.
« Parle, Joseph, qu’est-ce que tu veux ?
– Ton pardon. »
Joseph s’incline comme s’il voulait s’agenouiller, mais Marie, qui ne le touche habituellement qu’avec beaucoup de réserve, le saisit résolument par les épaules et l’en empêche.
Le visage de Marie change plusieurs fois de couleur, il est tantôt rouge, tantôt aussi blanc que neige comme avant.
« Mon pardon ? Je n’ai rien à te pardonner, Joseph. Je dois seulement te remercier encore pour tout ce que tu as fait ici en mon absence et pour l’amour que tu me portes. »
Joseph la regarde, et je vois deux grosses larmes se former dans la cavité de son œil profond, y rester comme sur le bord d’un vase puis rouler sur ses joues et sa barbe.
« Pardon, Marie. J’ai manqué de confiance en toi. Maintenant, je sais. Je suis indigne d’avoir un tel trésor. J’ai manqué de charité, je t’ai accusée dans mon cœur, je t’ai accusée sans justice parce que je ne t’avais pas demandé la vérité. J’ai fauté envers la Loi de Dieu en ne t’aimant pas comme je me serais aimé…
– Oh non, tu n’as pas péché !
– Si, Marie. Si j’avais été accusé d’un tel crime, je me serais défendu. Toi… Je ne t’ai pas permis de te défendre, car j’allais prendre des décisions sans t’interroger. J’ai péché contre toi en te faisant l’offense d’un soupçon. Un soupçon, c’est déjà une offense, Marie. Celui qui suspecte ne sait pas. Moi, je ne t’ai pas connue comme je l’aurais dû. Mais pour la douleur que j’ai endurée… trois jours de supplice, pardonne-moi, Marie.
– Je n’ai rien à te pardonner. C’est à moi, au contraire, de te demander pardon pour la souffrance que je t’ai causée.
– Ah oui, quelle souffrance, quelle souffrance ! Vois, ce matin, on m’a dit que j’avais des cheveux blancs aux tempes et des rides sur le visage. Ces journées m’ont fait vieillir de dix ans ! Mais pourquoi, Marie, as-tu été humble au point de cacher ta gloire, à moi ton époux, et permettre ainsi que je te suspecte ? »
Joseph n’est pas à genoux, mais il est si penché que cela revient au même. Marie pose sa main sur sa tête et sourit. On dirait qu’elle l’absout. Elle dit alors :
« Si mon humilité n’avait pas été aussi parfaite, je n’aurais pas mérité de concevoir le Très-Haut, qui vient effacer le péché d’orgueil qui a détruit l’homme. D’ailleurs, je n’ai fait qu’obéir… C’est Dieu qui m’a demandé cette obéissance… Elle m’a tellement coûté… pour toi, pour la souffrance que tu allais éprouver. Mais il fallait que je me taise. Je suis la servante de Dieu, et les serviteurs ne discutent pas les ordres qu’ils reçoivent : ils les exécutent, Joseph, même si cela leur fait verser des larmes de sang. »
A ces mots, Marie pleure doucement, si doucement que Joseph, qui est tout incliné, ne s’en rend pas compte avant qu’une larme ne tombe par terre. Il lève alors la tête et – c’est bien la première fois que je le vois faire ce geste –, il serre les petites mains de Marie dans ses mains fortes et hâlées et dépose un baiser au bout de ses doigts fins et roses, qui sortent comme autant de boutons de pêcher de l’étreinte des mains de Joseph.
« Maintenant, il va falloir faire face, parce que… »
Joseph ne termine pas sa phrase, mais contemple le corps de Marie qui rougit comme une pivoine et s’assied aussitôt pour ne pas exposer davantage ses formes au regard qui l’observe.
« Il faudra faire vite. Je viendrai ici… Nous accomplirons le rite du mariage… la semaine prochaine, ça te va ?
– Tout ce que tu fais est bien, Joseph. Tu es le chef de famille, et moi je suis ta servante.
– Non, c’est moi qui suis ton serviteur. Je suis le bienheureux serviteur de mon Seigneur qui grandit dans ton sein. Tu es bénie entre toutes les femmes d’Israël. Nous aviserons ta parenté ce soir même. Et après… quand je serai ici, nous travaillerons pour tout préparer à sa venue… Ah, comment recevoir Dieu chez moi ? Tenir Dieu dans mes bras ? Je vais en mourir de joie ! Je ne pourrai jamais le toucher !
– Tu le pourras, comme moi, avec la grâce de Dieu.
– Mais toi, c’est toi. Moi, je ne suis qu’un pauvre homme, le plus pauvre des fils de Dieu…
– Jésus vient pour nous, les pauvres, pour nous rendre riches en Dieu, il vient chez nous deux parce que nous sommes les plus pauvres et que nous le reconnaissons. Réjouis-toi, Joseph. La race de David a le Roi qu’elle attendait et notre maison devient plus somptueuse que le palais de Salomon : le Ciel, en effet, y sera présent et nous partagerons avec Dieu le secret de paix que les hommes connaîtront plus tard. Il grandira au milieu de nous, nos bras serviront de berceau au Rédempteur qui s’annonce et notre fatigue lui procurera sa nourriture… Oh, Joseph, nous entendrons la voix de Dieu nous appeler “ père et mère ! ” Ah… »
Marie pleure de joie, et ce sont des larmes de bonheur. Joseph, agenouillé à ses pieds désormais, pleure lui aussi ; sa tête est presque cachée dans l’ample vêtement de Marie qui descend en plis sur le pauvre carrelage de la pièce.